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Violence policières : La cécité de l’État

Enfin la question des violences policières est abordée dans les médias sous l’angle du racisme systémique ! Cela fait des années que des collectifs, « Justice pour Adama » au premier plan, mais d’autres aussi, alertent sur les contrôles d’identité discriminatoires, sur les violences subies par les jeunes hommes racisés, sur les morts inexpliquées.

La cécité de l’État face à ces alertes est coupable à plusieurs égards : les différents ministres de l’intérieur voulant satisfaire des syndicats de police puissants, ont laissé prospérer et couvert des agissements racistes. En laissant cette question sous le tapis, le pouvoir politique a fait grossir un monstre antirépublicain au sein même du corps de fonctionnaire chargé de représenter l’ordre.

Le 1er décembre 2018, à Marseille, Zineb Redouane décède suite à un tir de LBD qui l’a frappée au visage. Ses derniers mots, adressés à sa sœur, furent « ils m’ont visée ». Interpellé, le Ministre de l’intérieur tient ces propos : « Je ne voudrais pas qu’on laisse penser que les forces de l’ordre ont tué Zineb Redouane. Parce que c’est faux ». Le fait qu’il s’engage de cette façon, alors même d’une enquête est en cours vient renforcer un sentiment d’impunité au sein de la police.

Cette cécité est même organisée, structurellement, elle imprègne les institutions, les procédures : Le 23 mai 2019, la France a été condamnée par la CEDH, alors qu’un policier avait visé à la gorge M. Fouhed Chebab, âgé de 24 ans lors de son interpellation… en 2000. La légitime défense a été plaidée par le policier, et c’est donc pour enquête lacunaire et lente que la France a été condamnée. Les enquêtes, menées par l’IGPN – émanation de la police elle-même – sont rarement concluantes, et le faible nombre de policiers condamnés en atteste. La légitime défense, largement invoquée. Les « malformations cardiaques » ou autres pathologies régulièrement expertisées lors des enquêtes qui suivent des décès du fait de violences, permettent de faire échapper l’engagement de la responsabilité des fonctionnaires. « Le ministère de l'Intérieur est bien plus sévère pour les manquements aux règles internes que pour les violences policières», relevait en 2009 le chercheur Cédric Moreau de Bellaing, dans « Violences illégitimes et publicité de l'action policière ».

Il est temps d’une grande rénovation des structures d’enquête de la police, d’une séparation très nette des fonctionnaires de l’IGPN avec les autres services de police ; que le Ministre de l’Intérieur attende les résultats des enquêtes avant de se prononcer sur la culpabilité ou non des services de police.

Mathilde Julie Viot

 

Crédit photo : Dignity / Justice - Hermann.Click

 

 

 

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