Parler clair contre la main de fer

La dérive autoritaire de l’Union européenne a franchi un nouveau seuil avec la mise sous tutelle du Portugal. Un viol de la démocratie ! L’ancien premier ministre Socrates a démissionné après que son plan d’austérité a été rejeté par le Parlement. En attendant les élections, il n’est plus chargé que « d’expédier les affaires courantes ». Et le voilà qui dans ce contexte demande à l’Union européenne de placer le Portugal sous le régime d’exception des pays en difficulté. Il supplie juste que son pays échappe au FMI, préférant visiblement la main de fer de son prédécesseur de droite Barroso à celle du social-démocrate Strauss-Kahn.

Mais ce n’est que bla-bla hypocrite puisque le dispositif d’aide européen est piloté conjointement par la Commission, la Banque centrale européenne et le FMI lui-même. En conséquence, l’Union européenne se prépare à imposer aux Portugais les mesures d’austérité que leurs représentants élus ont refusées. Leur souveraineté est annulée sans qu’un soldat ait pénétré sur leur territoire ! Il aura suffi du traité de Lisbonne imposant sa libre invasion par les marchés mondiaux de capitaux qui font commerce de la dette des États.

Cet épisode atteste du durcissement des relations sociales, politiques et internationales qu’entraîne la crise du capitalisme (celle dont le si clairvoyant Strauss-Kahn disait en octobre 2008 que le pic était derrière nous). Le prélèvement de la finance sur le travail humain s’effectue dans des conditions plus brutales que jamais. Cette férocité fait éclater les précédents équilibres sociaux et politiques. C’est aussi le cas avec la grève de Carrefour. Pour satisfaire l’avidité exponentielle des actionnaires, le dividende ayant doublé en 9 ans, la direction du groupe veut diminuer jusqu’au montant de la participation versée aux salariés. Même ce modeste colifichet gaulliste doit être arraché du cou des travailleurs. Une grève sans précédent dans le groupe y a riposté. C’est un signe majeur de voir ainsi des salariés à temps partiel et au SMIC en grève massive. Ailleurs, les luttes des travailleurs les plus exploités et les plus précarisés se multiplient, comme ceux de la cuisine de Normale Sup, qui se heurtent là encore à la brutalité de la direction. Car ce sont les travailleurs au statut « flexible » qui subissent le plus vite le durcissement de l’exploitation promis à chacun.

Avec la hausse du coût des prix alimentaires, de l’énergie et du logement, des millions de nouveaux salariés vont être touchés par la précarité monétaire. Les ingrédients d’une révolte sociale s’accumulent. Pourquoi a-t-elle éclaté à Carrefour ? Parce que l’arrogance des actionnaires a révélé à ses victimes que leurs maux avaient des responsables. Elle éclatera donc partout pour peu que les profiteurs soient nommés. Le programme partagé du Front de Gauche y contribuera. Sa fonction n’est pas qu’électorale. En démontant les racines de la misère et de la précarité, il permettra à ses victimes de les combattre, devenant par leur lutte des acteurs de la vie sociale et politique du pays. Le programme est donc la question clé pour 2012. Les avancées réalisées ce week-end sur la candidature commune à la présidentielle laissent penser que la question qui fut hier fatale au rassemblement de l’autre gauche sera bientôt résolue par le Front de Gauche. Un émetteur collectif et cohérent s’avance donc sur la scène. Si cette voix parle à ceux qui galèrent et à tous ceux qui vont les uns après les autres subir le durcissement du capital, nul doute qu’elle ouvrira un chemin.

Partager cet article...
Share on Facebook
Facebook
Tweet about this on Twitter
Twitter
Email this to someone
email